Tuesday, August 7, 2012

Un an après, Londres oublie difficilement les émeutes de 2011

"Comme un mauvais rêve", c'est ainsi que The Economist décrit les émeutes d'août 2011 dans son édition du 4 août. "Ces quelques jours d'anarchie ressemblent aujourd'hui à une hallucination collective", poursuit le journal.

"Une amnésie bienheureuse frappe la classe politique [anglaise]", ajoute le Telegraph. Un an après les émeutes, les plus graves dans le pays depuis vingt-cinq ans, l'Angleterre préfère oublier et veut se donner une autre image, au moment où elle accueille les Jeux olympiques.
Dans le Daily Mirror, l'éditorialiste Tony Parsons veut comparer la jeunesse qui s'est exprimée lors des émeutes de 2011 et celle qu'on voit aux Jeux de Londres : "Un an après les émeutes, où l'on a vu le pire aspect de la jeunesse [anglaise], les Jeux de Londres nous montrent la jeunesse de notre nation sous son plus beau jour. Ne sont-ils pas magnifiques ? Ils ne volent pas, et croient au travail acharné pour réussir. Ils ne détruisent rien et construisent du rêve. Ils ne se comportent pas mal et font aussi bien qu'ils peuvent."
 
DES STIGMATES PESANTS
Loin de la flamme olympique, les stigmates des émeutes d'août 2011 demeurent. Dans un article intitulé "Là où les rues n'ont pas de flamme", le Sun montre, photos à l'appui, ce que sont devenus les lieux des violences. De nombreux bâtiments ne sont pas reconstruits, d'autres sont murés. Beaucoup reste à faire pour supprimer les "stigmates" des émeutes, selon le journal anglais.
Le Guardian s'est rendu dans le quartier où tout a commencé, Tottenham, au nord de Londres : "Même si les destructions ne sont plus visibles aujourd'hui, de profonds stigmates continuent de hanter ceux qui vivent et travaillent à Tottenham." Les commerces du quartier ont énormément souffert de ces événements ; les habitants, honteux, ne disent pas qu'ils vivent dans le quartier. En outre, précise le journaliste, "les plus gros problèmes de Tottenham, qui existaient avant les émeutes, ont été exacerbés cette année par la récession et les politiques économiques et sociales du gouvernement". Le Telegraph note en ce sens que "le taux de chômage des jeunes cet été est de 12 % supérieur à celui enregistré au moment des émeutes".
Autre source de tension dans le quartier de Tottenham, selon le Guardian : l'enquête sur la mort de Mark Duggan, à l'origine du déclenchement des émeutes, qui n'avance pas. Un an après le décès de son fils, tué par la police le 4 août 2011, la mère de Mark Duggan cherche des explications. "Je n'abandonnerai pas avant d'avoir obtenu justice pour Mark", a-t-elle expliqué dans un communiqué. Dimanche 5 août, une cérémonie était organisée en hommage à Mark Duggan à Tottenham, rapporte la BBC.

DE NOUVELLES ÉMEUTES ?
La quasi totalité des médias britanniques s'accordent à dire qu'un an après, de nouvelles émeutes sont possibles. Interrogé par le Daily Mirror, le député travailliste de Tottenham, David Lammy, parle d'un "âge des troubles" pour qualifier l'Angleterre d'aujourd'hui. Sarah Birch, professeure de sciences politiques à l'université d'Essex, interviewée par le Sun, explique que l'on peut envisager de nouvelles violences : "Beaucoup de facteurs, sous-jacents aux émeutes de l'année dernière, sont toujours présents. La situation économique s'est détériorée depuis douze mois, (...) il y a eu des coupes budgétaires, le nombre de policiers a baissé dans de nombreux endroits, et les services sociaux ont été affectés. En outre, le ressentiment envers les figures de l'autorité ne s'est pas atténué depuis l'année dernière. (...) Les conditions préalables à l'émergence de violences sont plus grandes aujourd'hui qu'il y a un an." L'Angleterre veut oublier son passé et se concentrer sur la flamme olympique mais, une autre flamme, oubliée celle-ci, pourrait à nouveau faire parler d'elle.

Source : http://www.lemonde.fr

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