Sunday, June 17, 2012

Accélération de l’histoire en Birmanie

Depuis que le pouvoir birman se donne des allures de gouvernement civil, tout se précipite : légalisation du parti de l’opposante Aung San Suu Kyi, libération de prisonniers politiques, visite d’un dirigeant américain pour la première fois depuis un demi-siècle…

Le long du fleuve Yangon, là où jadis allaient et venaient tigres et éléphants, deux garçons âgés de 12 ans s’agitent au milieu d’amas de briques et de débris, à la recherche de métaux à revendre. « Argent », se réjouit l’un deux en brandissant un tube en fer rouillé. Son camarade se baisse et, à l’aide d’un petit marteau, entreprend de débarrasser le bout de ferraille de son enveloppe de rouille. En quelques heures, la veille, le mur dressé à l’époque coloniale entre la ville et le fleuve a été démoli. A l’aube, les plus démunis ont alors accouru pour passer les gravats au crible.
Voici quelques mois, l’Autorité portuaire birmane de Rangoun a annoncé une vaste opération de dragage du fleuve, la première du genre, ainsi qu’un programme d’élargissement du Strand (la route du littoral). Un chantier d’une importance stratégique, puisque celui-ci relie les forêts du Nord au fleuve et constitue de ce fait la principale voie de transport pour le bois, l’une des ressources d’exportation les plus précieuses du pays.
Construit par les Britanniques il y a presque un siècle et demi, le Strand offre sa base au plan orthogonal de la ville — comme un symbole d’ordre tracé le long d’un fleuve lointain. C’était la dernière étape terrestre dans le périple des bois exotiques pillés par la puissance coloniale. Mais désormais, la route s’avère trop étroite et trop fatiguée pour résister au boom commercial qui s’annonce. D’où les travaux, d’un coût total de plusieurs millions de dollars, impliquant la percée d’artères comportant jusqu’à dix voies dans les zones les plus denses de Rangoun.
Destinée à permettre le passage de cargos de trente-cinq mille tonnes, contre quinze mille aujourd’hui, l’opération de dragage devrait, selon ses promoteurs, provoquer un triplement du trafic fluvial. Le port de Rangoun, qui marque la limite entre la Birmanie du Nord et la région de l’Ayeyarwady, pourrait donc renouer avec sa prospérité d’autrefois.
Dans les années 1920 et 1930, Rangoun est en effet le deuxième port d’immigration du monde après New York, une (...)

Source : www.monde-diplomatique.fr

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