Arnaud de la Grange, correspondant à Pékin
La tragique vague d'immolations par le feu de moines tibétains
continue et gagne cette fois Lhassa. Jusqu'à présent, ces actes
désespérés s'étaient produits dans les provinces chinoises à peuplement
tibétain, mais pas au Tibet même. Mais lundi, c'est dans la capitale de
la région autonome même que deux jeunes Tibétains, des moines
semble-t-il, se sont transformés en torches humaines.
Le drame s'est produit devant un haut lieu
religieux et touristique de Lhassa, le temple de Jokhang. Selon l'agence
Chine nouvelle, les policiers ont «réussi à éteindre les flammes en
quelques minutes». L'un des moines est mort, l'autre a été hospitalisé
dans un état critique. Ce dernier, nommé Dargye, serait originaire
d'Aba, une zone tibétaine de la province voisine du Sichuan. Une région
qui abrite le monastère de Kirti, haut lieu de la contestation. Le moine
décédé, Tobgye Tseten, âgé de 19 ans, viendrait de la région de Xiahe,
où est situé le célèbre monastère de Labrang, dans la province du
Gansu.
Depuis mars 2011, 34 Tibétains se sont immolés par le feu et au moins
24 sont morts. Mais une seule tentative avait eu lieu dans la région
autonome et aucune dans la capitale. Lhassa, déjà sous étroit contrôle, a
été immédiatement «envahie par la police et les forces paramilitaires,
et la situation est très tendue», a relaté Radio Free Asia. Un haut
responsable communiste de la région, Hao Peng, a déclaré que ces actes
étaient une «continuation des auto-immolations survenues dans les autres
zones tibétaines» et étaient «destinés à séparer le Tibet de la
Chine».
Un point de friction
À Vienne vendredi, le dalaï-lama - chef spirituel officiellement
retiré de la vie politique - et le premier ministre tibétain en exil
Lobsang Sangay se sont dits ouverts au dialogue avec la Chine. Ce
dernier a réaffirmé qu'il ne s'agissait pas d'obtenir l'indépendance du
Tibet, mais que la région aspirait à «une véritable autonomie dans le
cadre de la Constitution chinoise». À cette occasion, Lobsang Sangay a
dénoncé les «conditions inacceptables» de la présence chinoise actuelle,
ainsi que la situation «insoutenable» pour la population. Pékin a
protesté vigoureusement ce week-end contre la rencontre entre le
dalaï-lama et le chancelier autrichien Werner Faymann, dénonçant comme à son habitude «une ingérence sérieuse».
Le Tibet continue à être un point de friction entre la Chine et les
pays occidentaux. Et pourrait être un sujet sensible entre les nouveaux
gouvernants français et Pékin. Récemment, nos confrères d'Aujourd'hui la
Chine se demandaient si «le passé pro-dalaï- lama» du nouveau premier
ministre français «pourrait être un danger pour les relations
franco-chinoises». Ils rappelaient ainsi qu'en 2008, au plus fort de la
brouille franco-chinoise, Jean-Marc Ayrault, alors député, maire de
Nantes, avait accueilli chaleureusement le leader tibétain. Un drapeau
tibétain avait été hissé sur le fronton de la mairie. Et Jean-Marc
Ayrault s'était prononcé pour le boycott de la cérémonie d'ouverture des
Jeux olympiques.
Source : http://www.lefigaro.fr
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