Wednesday, December 21, 2011

Génocide arménien... France et Turquie en conflit

PARIS - Faisant fi de vives critiques turques, l'Assemblée nationale française a décidé - avec l'assentiment du gouvernement - d'examiner jeudi une proposition de loi condamnant la négation du génocide arménien, au risque d'une grave crise diplomatique et économique avec Ankara.

«Il n'est pas question pour nous d'accepter cette proposition de loi (...) qui dénie le droit de rejeter des accusations infondées et injustes contre notre pays et notre nation», a réagi dans un communiqué le chef de l'État turc, Abdullah Gül, en exhortant Paris à renoncer à une loi «inacceptable».
Le texte prévoit un an de prison et 45 000 euros d'amende en cas de négation d'un génocide reconnu par la loi. Paris a admis en 2001 l'existence d'un génocide d'Arméniens entre 1915 et 1917 (1,5 million de morts, selon les Arméniens).
Si elle reconnaît que jusqu'à 500 000 personnes sont mortes au cours de cette période, la Turquie considère qu'elles ont été les victimes des aléas de la Première Guerre mondiale et non d'un génocide.
Deux délégations turques, l'une composée d'hommes d'affaires, l'autre de parlementaires, ont été envoyées en début de semaine à Paris pour tenter d'empêcher un examen du texte de loi. Ces parlementaires ont rencontré mardi le chef de la diplomatie française, Alain Juppé.
«Le ministre d'État a exprimé la conviction que nos intérêts stratégiques communs, notre coopération pour la paix et la liberté en Syrie, en Afghanistan, notre appartenance commune à l'Otan ou au G20, nos coopérations culturelles et économiques, sont suffisamment forts pour surmonter les épreuves que peuvent traverser nos relations», a déclaré son porte-parole, Bernard Valero.
Sanctions
Ces derniers jours, la Turquie a menacé la France de représailles diplomatiques, économiques et culturelles si la loi était adoptée.
En premier lieu, Ankara devrait rappeler pour consultations son ambassadeur et parle de déclarer persona non grata son homologue français en Turquie.
En matière économique, le millier d'entreprises françaises opérant en Turquie pourrait se voir priver de marchés publics dans les domaines des transports, de l'armement et du nucléaire. La Turquie a compté près de 12 milliards d'euros d'échanges en 2010 avec la France.
La Turquie «est membre de l'Organisation mondiale du commerce et est liée à l'Union européenne par un accord d'union douanière. Ces deux engagements juridiques impliquent un traitement non discriminatoire à l'égard des entreprises de l'UE», a souligné le ministère français des Affaires étrangères.
La coopération culturelle, scientifique et technologique turco-française pourrait être également gelée par Ankara, selon une source proche du gouvernement turc.
Saveur électorale
Ces derniers jours, Ankara a notamment accusé le gouvernement français de vouloir, avec cette loi, récupérer lors de la présidentielle de 2012 le vote de quelque 500 000 «Arméniens de France».
Nicolas Sarkozy leur avait promis avant son élection en 2007 de soutenir un tel texte. En octobre dernier, il avait à nouveau jugé «pas acceptable» la négation du génocide arménien.
«Tous les cinq ans cette question revient avant les élections» présidentielle et législatives pour obtenir les voix des Français d'origine arménienne, s'est insurgée Ümit Boyner, présidente du patronat turc, TUSIAD.
Mardi, l'opposition socialiste française a annoncé son intention de voter le texte déposé à l'Assemblée nationale par un député membre du parti présidentiel UMP, tandis que le Sénat prévoyait des auditions début janvier sur le même sujet.
Dans un communiqué, le Conseil de coordination des organisations arméniennes de France a de son côté dénoncé les «ingérences» de la Turquie dans les affaires intérieures françaises.

Source : http://lejournaldequebec.canoe.ca

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