Wednesday, November 30, 2011

Le Tamaulipas, Etat-fantôme livré à la violence des narcos

Il y a des zones du territoire mexicain qui vivent presque entièrement sous le joug du crime organisé. Cette perte de contrôle des autorités, longtemps circonscrite au nord du pays, est, selon les experts, en train de s’étendre à plusieurs autres Etats, comme Veracruz, Michoacán, Guerrero et Nuevo León.

L’Etat du Tamaulipas, sur le golfe du Mexique, à la frontière avec les Etats-Unis, reste l’exemple le plus emblématique d’une région hors la loi. Les terribles Zetas y disputent le terrain à leurs anciens alliés du Cartel du golfe et l’extrême violence a particulièrement touché les civils : fusillades en pleine rue, extorsion de fonds, exode forcé, enlèvements et massacres de voyageurs. En août 2010, 72 migrants centro-américains et sud-américains étaient kidnappés et sauvagement abattus par les Zetas dans la petite ville de San Fernando (Libération du 27 août 2010). Le président Felipe Calderón promit alors de rendre justice aux victimes. Mais c’est tout le contraire qui se produisit. Les «narco-fosses» de San Fernando devinrent tristement célèbres. Entre avril et juin 2011, 193 cadavres ont été exhumés de plusieurs charniers. Les victimes sont pour la plupart des Mexicains séquestrés par les Zetas alors qu’ils voyageaient en autobus.
Routes. Lilia Morel a du Tamaulipas l’image qu’en ont beaucoup de Mexicains : un piège mortel. «Mon neveu de 17 ans a disparu là-bas, alors qu’il voyageait avec des amis, raconte-t-elle lors d’une manifestation contre la violence organisée par le poète Javier Sicilia à Mexico. Ils ont été interceptés par les Zetas, qui nous ont dit par téléphone qu’on ne les reverrait plus.»«Ici nous avons tout vécu, se désespère Raymundo Ramos, directeur du comité des droits de l’homme de Nuevo Laredo, l’une des villes plus dangereuses de la région. Nous ne pouvons pas circuler sur nos routes. Plusieurs journalistes ont été exécutés. Il y a régulièrement des groupes de détenus qui s’évadent de prison. Nous n’avons pas l’impression qu’il y ait un gouvernement ici.»
Le gouverneur de l’Etat, Egidio Torre Cantú, n’était pas destiné à occuper ce poste. Il avait repris en main la candidature de son frère, Rodolfo Torre Cantú, abattu par les narcotrafiquants une semaine avant les élections de juillet 2010. «Les gens ne sortent plus dans les rues. Mais la population doit autant se protéger des criminels que de l’armée et de la police», dénonce Raymundo Ramos, qui affirme que 15 jeunes ont disparu aux mains des militaires en juin à Nuevo Laredo.
Dévastation. Ciudad Mier est devenu l’un des symboles de la dévastation du Tamaulipas. «Petite ville, grande mort», titrent les journaux : des démographes américains y ont en effet comptabilisé 2013 assassinats pour 100 000 habitants, alors que la moyenne nationale est de 31. Cela en fait la deuxième municipalité la plus violente du pays. Or, pendant le mois de mai, Ciudad Mier s’est éteinte : 90% de ses 6 000 habitants ont fui aux Etats-Unis, lassés par les éternels affrontements entre cartels. Restent les maisons criblées de balles et les rues désertées.

Source : http://www.liberation.fr

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