Tuesday, November 29, 2011

Conférence de Durban : le climat intéresse-t-il encore les décideurs ?

La communauté internationale se réunit pendant deux semaines en Afrique du Sud pour statuer sur le réchauffement en cours. Sans ambition.


La 17e Conférence internationale sur les changements climatiques, qui s'ouvre ce matin à Durban, en Afrique du Sud, se conclura-t-elle, le 9 décembre, sur le même constat que ses deux devancières ? À savoir sur l'incapacité des nations à se confronter au réchauffement climatique ? Il y a deux ans, à Copenhague, au Danemark, certains des pays de la grand-messe onusienne étaient encore dans le déni, à l'instar de l'Arabie saoudite. L'an dernier, à Cancún au Mexique, on était plus dans l'évitement et le traitement des questions annexes. Reste à savoir si, cette fois-ci encore, le seul enjeu consistera à rendre présentable le manque d'ambition.
Le constat, validé par la communauté scientifique (à l'exception de quelques climatosceptiques dont la surface médiatique est inversement proportionnelle à leur crédit scientifique), peut tenir en quelques idées simples. Lutter contre le réchauffement climatique ne participe pas du simple principe de précaution puisque le risque est certain à 90 % - c'est la précaution d'usage parmi les climatologues.
En chiens de faïence
Sur la pente actuelle des émissions de gaz à effet de serre dues aux activités humaines (dioxyde de carbone, méthane, protoxyde d'azote, etc.), 48 milliards de tonnes en 2010, il n'y a aucune chance de maintenir le réchauffement planétaire sous la barre des 2 °C d'ici la fin du siècle. Psalmodié comme un mantra, cet objectif fait pourtant consensus au sein de la communauté internationale.
Il y a, en revanche, de fortes probabilités de voir le niveau des mers s'élever au-dessus de la fourchette donnée par les experts en 2007, de 18 à 59 centimètres. Il est tout aussi probable de voir les événements extrêmes - canicules, ouragans, inondations - revenir avec une fréquence accrue, d'assister à une désertification accélérée en plusieurs parties du globe et de devoir gérer des multitudes de réfugiés climatiques.
Tous ces éléments sont sur la table. Les derniers en date proviennent d'un rapport spécial du Groupement d'experts intergouverne- mental sur l'évolution du climat (Giec) sur les extrêmes climatiques, publié il y a dix jours.
Dès lors, comment expliquer l'inaction ? Sur l'agenda international, la crise économique et les dettes souveraines polarisent l'attention. Elles incitent les pays développés à remettre à plus tard (si possible aux prochains mandats électoraux) le questionnement du modèle de développement, basé sur l'usage des énergies fossiles, donc émettrices de carbone. De leur côté, les grands émergents - Chine, Inde, Brésil - ne sont pas disposés à casser leur croissance sur l'autel du climat, sachant que l'Occident a une responsabilité historique dans la situation actuelle : le carbone présent dans l'atmosphère a un cycle d'une centaine d'années.Le blocage peut se résumer à l'affrontement de la Chine et des États-Unis qui, tels des pistards ne voulant pas lancer l'effort en tête, se regardent en chiens de faïence. À eux deux, ces géants représentent maintenant 40 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Difficile de se passer d'eux pour définir une « feuille de route ».
La Chine est très attachée au protocole de Kyoto, un traité international qui engage les pays industrialisés (sauf les États-Unis) à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 5 % entre 2008 et 2012. Pékin appelle de ses vœux une deuxième période d'engagements, à partir de 2013, mais refuse la contrainte d'une baisse de ses propres émissions.
Climatosceptiques offensifs
Washington, au contraire, ne veut pas entendre parler d'efforts asymétriques. Le protocole de Kyoto est le cadet des soucis des États-Unis, qui ne l'ont jamais ratifié. Outre-Atlantique, l'offensive des climatosceptiques (ceux qui ne croient pas à l'influence des activités humaines et/ou au réchauffement lui-même), relayée par de puissants lobbys industriels, a eu raison des timides ambitions affichées par Barack Obama en début de mandat.
Dans ce mille-feuille d'intérêts divergents, l'Union européenne peine à faire entendre sa voix. Bruxelles n'est pas opposé à figurer le bon élève de la classe en pérennisant des objectifs contraignants. Ceci étant, l'Europe ne « pèse » plus aujourd'hui que 11 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Il lui faudrait gagner à la cause au moins un autre pays industrialisé pour enclencher une dynamique. Mais ni le Japon, ni la Russie, ni le Canada, tous signataires de Kyoto, ne veulent se lier les mains pour l'avenir. Dans ce contexte, le communiqué publié mardi dernier par Nathalie Kosciusko-Morizet paraît un tantinet décalé. « Le climat doit rester une priorité », claironne la ministre de l'Écologie. Avant de rester prioritaire, peut-être devrait-il le devenir…

Source : http://www.sudouest.fr

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